L'Assommoir by Zola Emile

L'Assommoir by Zola Emile

Auteur:Zola,Emile [Zola,Emile]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782253002857
Éditeur: AlexandriZ
Publié: 1877-01-16T23:00:00+00:00


L’enfant perdu que sa mère abandonne,

Trouve toujours un asile au saint lieu.

Dieu qui le voit le défend de son trône.

L’enfant perdu, c’est l’enfant du bon Dieu.

Sa voix tremblait sur certains mots, traînait en notes mouillées ; elle levait en coin ses yeux vers le ciel, pendant que sa main droite se balançait devant sa poitrine et s’appuyait sur son cœur, d’un geste pénétré. Alors, Gervaise, torturée par la présence de Lantier, ne put retenir ses pleurs ; il lui semblait que la chanson disait son tourment, qu’elle était cette enfant perdue, abandonnée, dont le bon Dieu allait prendre la défense. Clémence, très soûle, éclata brusquement en sanglots ; et, la tête tombée au bord de la table, elle étouffait ses hoquets dans la nappe. Un silence frissonnant régnait. Les dames avaient tiré leur mouchoir, s’essuyaient les yeux, la face droite, en s’honorant de leur émotion. Les hommes, le front penché, regardaient fixement devant eux, les paupières battantes. Poisson, étranglant et serrant les dents, cassa à deux reprises des bouts de sa pipe, et les cracha par terre, sans cesser de fumer. Boche, qui avait laissé sa main sur le genou de la charbonnière, ne la pinçait plus, pris d’un remords et d’un respect vagues ; tandis que deux grosses larmes descendaient le long de ses joues. Ces noceurs-là étaient raides comme la justice et tendres comme des agneaux. Le vin leur sortait par les yeux, quoi ! Quand le refrain recommença, plus ralenti et plus larmoyant, tous se lâchèrent, tous viaupèrent[54] dans leurs assiettes, se déboutonnant le ventre, crevant d’attendrissement.

Mais Gervaise et Virginie, malgré elles, ne quittaient plus du regard le trottoir d’en face. Madame Boche, à son tour, aperçut Lantier, et laissa échapper un léger cri, sans cesser de se barbouiller de ses larmes. Alors, toutes trois eurent des figures anxieuses, en échangeant d’involontaires signes de tête. Mon Dieu ! si Coupeau se retournait, si Coupeau voyait l’autre ! Quelle tuerie ! quel carnage ! Et elles firent si bien, que le zingueur leur demanda :

— Qu’est-ce que vous regardez donc ?

Il se pencha, il reconnut Lantier.

— Nom de Dieu ! c’est trop fort, murmura-t-il. Ah ! le sale mufe, ah ! le sale mufe… Non, c’est trop fort, ça va finir…

Et, comme il se levait en bégayant des menaces atroces, Gervaise le supplia à voix basse.

— Écoute, je t’en supplie… Laisse le couteau… Reste à ta place, ne fais pas un malheur.

Virginie dut lui enlever le couteau qu’il avait pris sur la table. Mais elle ne put l’empêcher de sortir et de s’approcher de Lantier. La société, dans son émotion croissante, ne voyait rien, pleurait plus fort, pendant que madame Lerat chantait, avec une expression déchirante :



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